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L’École dans un état
« extrêmement inquiétant » :
il faut apprendre à nos enfants à s’ennuyer
Presse-Océan - Bruno Geoffroy
Modifié le 25/10/2025 à 09h54
Publié le 25/10/2025 à 07h09
Chaque samedi, l’éditorial de Presse Océan. Cette semaine, il est consacré à la situation de l’Éducation nationale décrite par le nouveau ministre Édouard Geffray comme « extrêmement inquiétante »… et à une réforme qui ne sera jamais engagée.
Que dire qui n’ait déjà été maintes fois ressassé sur la baisse du niveau scolaire, l’ascenseur social de l’école en panne ou la préoccupante santé psychique des élèves ? Le nouveau ministre de l’Éducation nationale a résumé ce que nous savons tous :
« "C’est extrêmement inquiétant" ».
Parmi toutes les réformes qu’Édouard Geffray n’est pas du tout certain d’avoir le temps d’engager, il est une initiative qui n’a aucune chance de voir le jour. Elle ferait hurler nombre d’enseignants et de parents. Elle ne trouverait aucun responsable politique pour la défendre. Elle serait dénoncée comme un scandale.
Et pourtant, il faudrait de toute urgence enseigner l’ennui à l’école. Quand les réseaux sociaux enferment dans leurs algorithmes tout en promettant une ouverture sur le monde et quand ils soumettent à la violence extrême d’être sans cesse sollicité et sans cesse observé, il faudrait offrir à nos enfants le luxe de se tenir, pendant un temps seulement, loin du monde et des autres.
L’ennui n’est pas nécessairement une plaie honteuse, cousine de la paresse, qu’il convient de combattre. Il peut être fertile quand il conduit à la contemplation, à l’imagination, à la réflexion. Il est une bénédiction quand il offre à la rêverie des heures que l’on croit à tort perdues.
Ses plaisirs ne sont pas immédiats et ses bienfaits n’ont rien de spectaculaire. Mais il participe à construire une personnalité, il aide à mieux comprendre le tumulte ambiant en permettant de s’en extraire, il pose des bases qui accompagnent toute une vie.
« "Deux et deux quatre,
quatre et quatre huit,
huit et huit seize"… »,
écrit Jacques Prévert pour évoquer cet ennui qui plombe (*). Mais bientôt, l’enfant las d’ânonner avec le professeur aperçoit l’oiseau-lyre. Alors
« "l’encre redevient eau,
les pupitres redeviennent arbres,
la craie redevient falaise"… ».
(*) « Page d’écriture ». Recueil « Paroles » de Jacques Prévert
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